• Grand écart !

    Nos vendredis soir sont rythmés par des soirées religieuses. Nous y côtoyons une belle équipe de joyeux lurons dans une ambiance potache : quelques plaisanteries grivoises parsemées entre deux prières et un chant confessionnel.  Nous y aimons l’esprit communautaire mais y regrettons souvent que les embrassades restent désespérément chastes. Les couples sont festifs et bienveillants mais surtout certains dégagent un charme de folie. Nous devons rester concentrés sur la voix divine pour échapper au supplice de Tantale.

    Le samedi soir : tout est permis ! Nous troquons la tsiniout pour nous auréoler de paillettes et de transparence.

    Ce soir, nous mettons le cap sur Barbizon : un village charmant comme un décor de conte de fées. La forêt, les rues pavées et les impressionnistes, tout est réuni pour rêver en flânant le long des petites cours pittoresques. Notre arrivée se déroule avec embûches : une réservation introuvable et une chambre où il faut choisir entre chauffage ou eau chaude. Mais les sourires et la bonne humeur de Fya et Dan balaient nos contrariétés en un instant. Ils sont nos photographes préférés. Immédiatement, une nouvelle ambiance s’empare de cette chambre un peu fade. L’un met la musique, l’autre ouvre le champagne, une trousse de maquillage se déploie, des projecteurs s’érigent, la lumière devient à la fois plus douce et plus perçante, l’atmosphère se transforme. J’enfile mon costume de timidité. Être modèle, sentir leurs regards et tenter de répondre aux attentes, c’est une épreuve. Comme un défi à relever, percevoir dans l’œil du photographe, l’étincelle de la pose réussie quand il s’écrie « je l’aie ! » Hasarder de multiples tentatives, des positions invraisemblables pour dompter mes formes à la lumière.

    En permanence, je suis en lien avec mon mari, son regard me soutient, m’encourage et me rassure. Le bleu de ses yeux brillants me protège, son amour m’enveloppe. Il m’embrasse, je me blottis contre lui, nous posons ensemble. Mes nuits d’insomnies m’ont inspiré des idées folles. Je crains en peu d’affoler Dan et de bousculer son projet artistique. Mais il pousse encore davantage mes excentricités, il imagine des scènes loufoques et des clichés délirants. Nous rions, nous trinquons et savourons les premières images. Nous sommes éblouis, le résultat est incroyable.

    Dan et Fya laissent la place à Paul et Sophie avec qui nous avons prévu de passer la soirée. Nos retrouvailles sont toujours un délice. Les années qui défilent nous rendent complices comme de vieux amis. Le mois dernier, Sophie m’a accordé le bonheur suprême d’une après midi seule avec son mari. Je suis consciente de la chance que j’ai eue de profiter de Paul dans une intimité magnifique. Nous nous retrouvons ce soir sur le lieu de notre shooting, encore tout étourdis de nos émotions photographiques. Entre le champagne, nos câlins et notre tendresse partagée, cette soirée est merveilleuse. Nous blottissons tous les quatre sous la couette pour combler des degrés qu’il manque à cette chambre. On rit comme des enfants. Nos caresses légères, nos rires, nos discussions interminables, notre libertinage ne ressemble à aucune configuration classique, il dépasse le commun et l’ordinaire parce qu’avant tout nous sommes amis !

    Une nouvelle semaine et de nouvelles aventures !

    La soirée religieuse prend fin et ouvre la porte à un samedi étourdissant ! Nous organisons une soirée multi ! Nous avons pris l’habitude de ponctuer chaque saison par une petite fête à la maison : voici la soirée d’hiver ! Chacune est différente, chacune a une couleur particulière, chacune annonce son lot de rebondissements et de surprises. Depuis le subtil jeu des invitations jusqu’au brunch dominical rien ne se passe jamais comme on l’avait prévu et nous adorons cela. Nous préparons chacune avec soin particulier et une excitation toujours nouvelle.  

    Il y a les invités qui répondent et ceux qui ne répondent pas, ceux qui annulent, ceux qui ne pensent pas venir et qui viennent finalement, il y a ceux qu’on n’attendait plus et qui surgissent au dernier moment sans prévenir et il y a nos préférés :  les fiables !

    Nous cherchons sans cesse la formule idéale, celle où les invités se sentent le mieux. Nous expérimentons de nouvelles formules, des nouvelles idées glanées auprès d’autres organisateurs. Nos esprits fourmillent à la préparation de ces soirées. Dans l’imbroglio du jeu des invitations, nous avons à cœur de maintenir une harmonie, nous ne sollicitons pas des couples au hasard mais toujours avec l’espoir qu’une alchimie naisse parmi ceux que nous avons choisis. Le suspens est comme une mayonnaise, sa réussite est aléatoire. Il y a tant de paramètres.

    Après moulte revirements, nous accueillons trois couples et une femme. Elle s’appelle Sissi, elle est la petite protégée de mon mari et elle ose traverser les forêts pour nous rejoindre. Mila et Solal sont nos amis depuis de nombreuses années, nous avons vécu de belles aventures ensemble. Leur histoire a débuté sur un site de rencontre libertine, leurs deux fiches se sont jointes en une, leurs deux appartements se sont transformés en un vaste duplex, leurs fils se sont assemblés comme une seule famille, leur amour a forgé le tout ! Après quelques mois de pause, ils reviennent dans le jeu et nous sommes flattés qu’ils nous aient choisis :  Solal, l’élégance naturelle et Mila, la sensualité envoûtante font leur grand retour !

    La magie de ce réseau social nous a portés vers des couples de l’ouest atlantique. De découvertes en découvertes, nous voilà sous le charme de plus en plus de nantais et de vendéens, un déménagement va bientôt s’imposer ! Ils auraient pu affréter un bus mais finalement ils vont arriver les uns après les autres. Le vent frais de l’océan nous apporte Eyal, Eden, Kay et Jonas. Ils débutent dans ce type de soirée, nous ressentons quelques appréhensions. Nous tentons de les rassurer, chez nous, tout sera léger, sans chichi et sans manière, aucune pression, aucune attente ni aucune exigence. Notre seul espoir est que chacun reparte le sourire aux lèvres. Jusqu’au dernier moment, on se demande s’ils viendront et ils viennent ! Les kilomètres ne leur font pas peur. Portés par la marée et les embruns, les bras chargés de vins et de douceurs salées, les voici chez nous !

    Quand la porte s’ouvre, je suis immédiatement séduite par leurs visages d’anges et leurs corps de rêve. Ils sont pétillants et beaux comme des dieux, c’est un coup de foudre : Jonas, le regard mystérieux, Kay drapée dans une fausse timidité, Eyal, distribuant avec générosité une jovialité exquise et Eden sortie d’un écrin, parée d’une étincelante beauté. J’admire leurs larges sourires, je savoure leurs conversations animées, je suis rassurée, je pressens dans les prochaines heures, un partage riche de rires, d’intensité et de douceur où les corps exulteront avec les esprits.

    Des premiers mots à la première batchata, je me laisse envelopper par l’alchimie de douces délicatesses et de tendres virilités. Le rayonnement solaire des demoiselles, l’allure distinguée des messieurs et le soupçon de timidité de Sissi, tout me plait, l’ambiance m’électrise. Les danses deviennent plus langoureuses, Eden est blottie, la bouche collée contre celle de mon chéri, je virevolte dans les bras de Jonas, la musique nous emporte dans une proximité tactile où nos corps se découvrent les uns aux autres. Une envie insoutenable de plonger dans l’incandescence m’envahit, je rêve de filer vers les chambres. Eyal semble chaud comme la braise, je l’entraine aisément. Mais l’art de la maîtresse maison consiste à n’oublier personne sans se sacrifier, cela réclame de la vigilance. Heureusement, Mila et Solal veillent avec nous.

    Trois trios inflammables débutent. Lovée entre Kay et Jonas, je respire le parfum de leurs peaux. Elle excelle en jeux de mains très vilains, elle faufile ses doigts en moi, nous nous partageons le sexe de son homme, je dégrafe sa robe puis son body de dentelle, découvrant son corps torride et sa croupe volcanique, mes caresses la découvrent sous tous les angles, elle est sublime. Envolée sa timidité de débutante, elle s’épanouit comme une fleur au rayon du soleil, elle n’est ni timorée ni craintive. Jonas expose son beau corps musclé à nos caresses, il est le centre de nos attentions et cela semble lui plaire énormément.

    Des gémissements traversent la cloison, j’imagine mon mari de l’autre côté.  Il est au cœur de l’amoureuse complicité d’Eden et d’Eyal. Immergé dans leur sensualité débridée, il dépasse les limites auxquelles il s’accrochait depuis si longtemps et regrette que je ne profite de ce spectacle inédit.

    Nous voici tous réunis comme sur le radeau de la Méduse dans le naufrage de toutes les convenances.  Serrés, dans un joyeux méli- mélo de corps enchevêtrés, les gémissements et les étreintes font frissonner la nuit. Telle une anguille, je serpente entre leurs corps brûlants, je ne sais plus à qui appartiennent les caresses, j’ignore qui est près de moi, je reconnais les bas dentelés de Kay et les doux cheveux blonds d’Eden au milieu de scènes fantastiques. Je me sens légère comme en lévitation dans la ouate et j’avais perdu cette sensation depuis longtemps.  Nous vivons dans un monde parallèle, dans un brouillard étrange où se mélangent nos énergies magnétiques à fleur de peau et à fleur d’âmes.

    Par flashes, je vois le visage rayonnant de Mila et le tempérament de diablesse d’Eden sous son masque angélique, les étoiles dans les yeux de Sissi et la langue de mon chéri. J’entends les gémissements de Kay, Je sens la chaleur de Jonas, les mains de Solal et l’érection d’Eyal. Un sexe se glisse en moi, je l’accueille avec plaisir, j’aime cette sensation irréelle de ne pas savoir à qui il appartient. Sous l’oppression médiatique des injonctions au consentement, je me sens consentante à souhait pour tous les hommes de cette nuit. Ce n’est pas ce glissement de sexe qui me donne du plaisir c’est plutôt l’alchimie des âmes.  Je profite de la générosité exquise d’Eyal avec un goût de trop peu, j’admire Eden, transcendée par ses courbes divines et son corps de liane, elle est affolante et surprenante, je déguste leur plaisir fusionnel, son homme la guide vers l’orgasme avec amour. Je savoure ces cris qui la font jouir, l’acoustique de l’érotisme et le son de son plaisir.

    Je me niche légèrement en retrait pour profiter du spectacle luxuriant. Je voudrais figer le sablier. Dans la pénombre, quatre déesses argentées se cabrent sous le plaisir. Est-ce un rêve ou une réalité ?

    Je suis seule sous la douche. Souvent, c’est un lieu de jeux inouïs mais cette nuit, personne ne vient me rejoindre. L’eau glisse lentement sur mon corps apaisé. Dans la cuisine, l’heure est au grignotage sucré et aux conversations joyeuses. Les uns sont nus, les autres enroulés dans une serviette, Mila porte la chemise de Solal, elle est délicieusement belle.

    Eden, Eyal et mon chéri ne sont pas là. Je les imagine encore dans les draps, cette idée me rend heureuse. Ils poursuivent une joute sensuelle en écoutant le bruit de nos voix. Guidé par la simplicité et la légèreté de leur couple, mon mari se laisse aller à leurs jeux sans tabou.

    Au cœur de la nuit, nous voici réunis au salon. Bercés par les étoiles, le sourire aux lèvres, nous partageons des plaisirs simples entre amis intimes. L’intelligence, la finesse d’esprit, l’esthétisme des corps et la beauté des âmes sont réunis. Eyal couve des yeux sa dulcinée, il la couvre d’un plaid et lui caresse les pieds longtemps. Je les mange du regard en espérant un second round mais rien ne se déclenche. Je cherche désespérément comment les entraîner vers de nouvelles étreintes, je rêve de réitérer ce mélange extraordinaire. Quand Mila annonce le départ, je capitule paradoxalement comblée et frustrée.  

    Le lendemain, c’est un puzzle qu’il faut reconstituer avec délectation. Le retour à la réalité est difficile comme toujours après les très belles soirées. Nous oscillons entre grosse fatigue et petite déprime. Nous avons une folle envie de les revoir.

    Lundi matin, ma collègue arrive la mine réjouie, elle nous présente sa nouvelle voiture qui sait même dire bonjour quand on l’ouvre. Je souris, ma voiture ne sait pas dire bonjour mais je suis rayonnante moi aussi pour des raisons différentes.

    « Top et flop (partie 2)Shooting »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :